la vie où l'on court chapitre 12 (fin)

17 Octobre 2021

« Cette histoire est entièrement vraie puisque je l’ai inventée d’un bout à l’autre » Boris Vian

Je remet la citation du début de notre histoire et vous rappelle que j'avais rajouté "l’histoire que je vais vous raconter est entièrement vraie puisque je vais l’inventer, cependant il y aura une grande partie qui sera fausse puisque tirée de faits bien réels, personnels et intimes qui sont arrivés ou arriveront au personnage que nous allons appelé « Raoul » ... mon histoire comportera 12 chapitres qui correspondront à une semaine de préparation "
Nous sommes le 17 octobre 2021, je vais laisser Raoul conclure le 12 ème chapitre. Je rappelle juste quelques chiffres 12 semaines d'entrainement, près de 600km parcourus et une haleine et des aisselles toujours fraiches…

Jeanne

Je pense que les couples devraient se connaître, s’aimer, se fondre l’un dans l’autre quitte à ne plus savoir qui est qui puis devraient se quitter pour une solitude salvatrice dont ils ne sauraient pas l’issue.
Nous sommes des êtres admirables quand solitaire nous ne désirons qu’une chose, celle d’être aimé pour aimer en retour. Nous sommes des êtres effroyables quand nous nous sentons aimés ou trop entourés et oublions les premières paroles, les premières confidences, les promesses, la solitude et volons ce que nous ne rendrons pas.
   Ainsi je t’avoue je sais que j’ai besoin de “la solitude du coureur de fond” quel titre sublime! J’aime cette solitude, j’aime les longues routes droites où les pensées peuvent s’exprimer, se contredire, s’interpeller. Je ne cours pas pour gagner, d’ailleurs je ne le pourrai pas, je cours pour me rappeler ce que je ne veux pas, ce qu’il ne faut pas, ce qui serait extraordinaire.
   Je me rappelle d’un professeur de français qui disait que dans les bons romans il y a toujours un indice qui nous dévoile la fin et qui à première vue passe inaperçu. Je pense que nos vies sont ainsi faites, pleines d'indices, de mise en garde que nous ne décelons pas, emportés par les vagues de nos existences en mouvement. Nous pourrions anticiper les résultats de nos actes si nous suivions nos instincts. Je pense même que nous pourrions modifier nos vies si nous savions analyser ces signes. Malheureusement l’interprétation se fait le plus souvent à posteriori…
   Les marathons que j’ai courus ont été pour moi des indicateurs de mon état d’esprit, de la force ou de la faiblesse qui était la mienne à ces moments. Ainsi j’ai connu les presque, la victoire et la défaite lors de mes marathons. Il n’y a qu’aujourd’hui que je l’ai compris donc inutile de te dire que les erreurs ont été commises…

Voilà aujourd’hui j’ai retrouvé j’espère cette humilité devant la route qu’il me faut faire, retrouve un regard compatissant envers ceux qui sont épuisés et un même regard ignorant la jalousie vis à vis de ceux qui ont des qualités qui ne sont pas les miennes. J’ai hâte de retrouver ce trentième kilomètre, ces jambes lourdes, cette tête vidée, cet estomac qui ne supporte plus les barres de céréales où les gels. Retrouver le bruit sourd des pas sur le goudron pendant les dernières foulées avant l’explosion de joie, de fatigue. Je veux retrouver ce silence, les paroles sont trompeuses, je veux retrouver ce souffle créé par ma course en espérant qu’il attise les braises des désirs sur lesquels j’ai jeté un drap obscurcissant…
Tu es venu tôt et tard dans ma vie et lors de certains réveils je m’interroge si tu es réel où le fruit de mes dialogues incessants pendant ces heures d'entraînements…
Voilà je t’écris tout cela avant cette dernière semaine qui ne sera qu’attente, espoir, anxiété … La course s’apparente pour moi à la vie. Je vais y chercher des moments de convivialité, des réponses, être acteur, me réjouir d’être là et en bonus savoir comment je vais!
Je reviens, ne t'inquiète pas !
Fin

lepoetedusiecle